De la géologie à la mécanique, en passant par la biologie, l’imaginaire scientifique est un élément central de mon lexique. Tout comme les artistes de la renaissance ont voulu comprendre ce qu’il y avait « sous la peau », je m’intéresse au fonctionnement des objets, des systèmes. Cet intérêt est toutefois teinté par une vision contemporaine de l’univers, par la fin de l’utopie du « grand horloger » et d’un système immuable dont on peut définir clairement les règles, par la conscience d’un monde forgé par l’imperfection, dans lequel la dysfonction, l’échec et l’erreur jouent un rôle essentiel dans l’évolution du vivant, de l’humanité ou de l’individu.
Mon travail se présente également comme une réflexion sur une production culturelle de moins en moins portée par l’objet mais par plutôt par une interface technologique qui tend à tout normaliser. Nous avons développé avec la technologie un rapport extrêmement familier qui laisse de moins en moins de place à l’étonnement. Ce rapport est le résultat de plusieurs siècles au cours desquels la spécialisation et le cloisonnement des disciplines ont permis des réalisations technologiques de plus en plus poussées, tout en créant une distance de plus en plus grande entre la technique et son utilisateur. Nous sommes en quelque sorte plus impressionné de voir bouger un automate que de pouvoir se géo localiser. Dans ce contexte, l’objet « bricolé » me semble donc plus pertinent que jamais.
C’est ainsi par l’approximatif, la lenteur et l’anti-performance que mon instinct me pousse à répondre aux nouveaux défis posés à l’artiste. C’est par la matière que je réponds à la dématérialisation de la culture. C’est par un dérisoire théâtre de marionnettes que je réponds au virtuel. Je veux explorer l’antithèse de la haute technologie, la fragilité de l’expérience humaine individuelle et collective par la fragilité de l’objet.